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Alain Bergeon est un peintre de l’apnée. En eaux profondes.
Avant chaque plongée, preparation solitaire et méticuleuse.

Choisit d’abord un grand carré de toile et le tend à le fendre sur un cadre de bois. Porte l’ensemble sous la lumière oblique du grand atelier cathédrale. Se place devant, bien devant, pas un peu de côté, non, juste en face, le front tout contre la surface. Et là, ferme les yeux. Puis longuement inspire, jusqu’à dilatation complète du dernier pore. Phase 1, délicate, dite de de l’impression. Descente progressive, sous l’emprise de l’onde, à chercher follement de la main le contour des ombres. Un corps, un autre corps, emmêlés en fuite, pas tout à fait raccord. Histoires d’amour, de rêves et de mort, d’amour à mort en rêve ou de rêveuses amours mortes… Mais déjà vient l’heure de lâcher la pression, doucement, avec d’infinies précautions, et c’est la phase 2, celle de l’expression. Le peintre, bras tendus, pressé maintenant de retrouver le jour, laisse filer l’encre comme on expire un air trop longtemps contenu. Le gras du trait sature la toile, le pourpre incendie l’arrière-plan, la figure excède considérablement la géométrie très insuffisante d’Euclide. Le pinceau, comme une torpille, va crever le miroir. Mais trop tard, toujours trop tard; première gorgée d’oxygène pure à faire mal, violente et vitale comme un cri primal. Et l’inaccompli, encore une fois s’achève.

 

Pascale Solignac

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D’une façon compulsive, ininterrompue, Alain Bergeon dessine, croque, peint, cherche, produits des centaines d’esquisses, en jette autant,crée des toiles mais aussi des affiches, encore des décors, des mises en espace inspirées d’Henri Michaux ou de Ionesco, qui sont autant de tentatives d’interroger la vie .

La frustration est son moteur, il travail les séries, toujours sur des matériaux pauvres ( il dit que le beau papier lui constipe la création!) Au fil des années, au fil des expos( enFrance mais aussi en Angleterre, en Espagne ou au Japon), l’homme qui peint » de jour comme de nuit » développe des thèmes majeurs, toujours liés à la condition humaine, à l’état du monde, à son nécessaire engagement d’artiste dans l’actualité.

Grands formats, volupté, paysages intérieurs d’une humanité croquée dans sa nudité, forte et fragile, caressée par la dérision attendrie d’Alain Bergeon.

 

M.Helene Galan,  journaliste

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L’idée d’une nouvelle création m’est toujours venue à travers un bouleversement. Il faut que mes terres tremblent pour me pousser à construire à partir de la faille.

Au commencement, un tranquille séisme intérieur est nécessaire, un trouble d’où peut naître l’envie d’explorer de nouveaux territoires issus de nouvelles confrontations, un désir d’ombre autant que de lumière. La découverte des « grandes «  et des « petites voluptés », série de tableaux d’Alain Bergeon, exposant des corps enlacés en une succession de poétiques étreintes, me procura immédiatement cette nécessaire déflagration.

Ces corps à corps amoureux ; ces luttes tendres et lascives magnifiées par la couleur ; le travail du trait, paradoxal, à la fois lourd, large, et léger dans l’évocation, toujours fragile dans la démonstration ; cette plongée contemplative dans nos propres mystères qui évoque cette peinture de la sensualité ; tout cela provoqua immédiatement le désir d’en saisir l’innommable, d’en faire la matière d’un spectacle vivant. Dans ces étreintes énigmatiques autant qu’érotiques, à travers cet échantillonnage charnel où les corps s’accrochent les uns aux autres pour ne pas sombrer, s’exprime quelque chose de nos chaos intimes.

Alain Bergeon nous laisse apercevoir la palpitation des corps sur les textes de l’Amour. Quelque chose demande à être partagé.

Jean-Luc Ollivier

 

Le Triptyque de Voluptés marque la troisième collaboration entre le metteur en scène Jean-Luc Ollivier et le plasticien Alain Bergeon, après Portraits d’Avant la Nuit, (dont l’enjeu était de rendre les toiles d’Alain Bergeon vivantes, sous un angle poétique et plutôt humoristique, en reprenant le parcours d’un musée dont les personnages peints s’évaderaient des tableaux) et le Léopard Myope, (où la peinture d’Alain Bergeon faisait une large incursion dans l’univers d’Henri Michaux). A l’occasion de la création de Portraits d’Avant la Nuit, Jean-Pierre Sag, maître de conférences à l’UFR d’Arts Plastiques et Sciences de l’Art de Paris 1 Sorbonne, écrivait :

« la réalisation de Jean-Luc Ollivier et Alain Bergeon est profonde. Il n’est pas si fréquent d’associer onirique, pictural et théâtral. Les deux artistes ouvrent une réflexion originale sur les rapports parfois concurrentiels entre théâtralité du jeu d’acteurs et théâtralité de l’œuvre picturale.

Compte tenu du monopole de la parole au théâtre, la peinture ne risque –t-elle pas toujours d’être réduite à un rôle décoratif ? Redonner aux tableaux muets une langue des signes active, c’est ce que tente d’imaginer Jean-Luc Ollivier pour ces créations du peintre Alain Bergeon.»

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Technique de la tempera_____________________________________

extrait J.P.Sag